3 questions à Joël Suhubiette : « Depuis 50 ans, des générations de musiciens se succèdent au sein de l’ensemble et aujourd’hui, autour d’une équipe d’artistes fidèles avec qui nous avons construit un son, une couleur, nous continuons l’aventure dans cette diversité des répertoires. »
Juillet 2024
Par Marine Gacogne
© Romain Serrano
En 2024, l’Ensemble Jacques Moderne célèbre ses 50 ans. Un anniversaire plutôt rare parmi les ensembles indépendants et qu’il convient de marquer d’une pierre blanche. À cette occasion la FEVIS a rencontré Joël Suhubiette, directeur artistique de l’ensemble depuis 1993. Il évoque avec nous le parcours de l’ensemble et les temps forts de cette saison anniversaire.
50 ans c’est un bel âge, plutôt rare parmi les ensembles indépendants. Comment expliquez-vous la particularité de cette longévité ?
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En fêtant cet anniversaire, si nous pouvons nous réjouir du chemin parcouru, nous sommes aussi animés par de nouveaux projets et une énergie toujours renouvelée, souhaitant développer et renforcer le travail initié en 1974 puis en 1993.
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Joël Suhubiette : Il faut dire que l’ensemble a eu deux vies… une première avec son fondateur le musicologue Jean-Pierre Ouvrard qui l’a dirigé pendant les 20 premières années et une seconde avec moi depuis 30 ans maintenant. Jean-Pierre a forgé l’identité première de l’ensemble en en faisant à l’époque un véritable « laboratoire » d’exploration de la musique de la renaissance. C’était alors unique en France avec ce répertoire ! L’ensemble avait son chœur, son consort de violes et ses cornets et sacqueboutes et étudiants, jeunes professionnels s’attachaient à interpréter le répertoire sorti des bibliothèques par les musicologues. Quand j’ai pris la succession de Jean-Pierre j’étais encore chanteur et jeune assistant de Philippe Herreweghe et j’avais donc pu explorer la polyphonie du XVIème siècle et bien sûr le répertoire baroque. C’est donc avec enthousiasme que je me suis lancé dans l’aventure. Avec moi l’ensemble a continué d’interpréter le répertoire de la renaissance française, espagnole, italienne et anglaise et parallèlement interprété Monteverdi, Scarlatti, Schein, Schutz, Buxtehude, Bach, Purcell et bien d’autres compositeurs de l’époque baroque.
En fêtant cet anniversaire, si nous pouvons nous réjouir du chemin parcouru, nous sommes aussi animés par de nouveaux projets et une énergie toujours renouvelée, souhaitant développer et renforcer le travail initié en 1974 puis en 1993.
Depuis 50 ans, des générations de musiciens se succèdent au sein de l’ensemble et aujourd’hui, autour d’une équipe d’artistes fidèles avec qui nous avons construit un son, une couleur, nous continuons l’aventure dans cette diversité des répertoires.
Ensemble Jacques Moderne © Fabien Garou
Découvrez le teaser de la saison anniversaire de l’ensemble
Tout au long de la saison, Roland de Lassus, Josquin Desprez, ou alors William Byrd et Thomas Tallis et en point d’orgue de cette année anniversaire, le baroque opéra de chambre « La descente d’Orphée aux enfers » de Marc-Antoine Charpentier. Une pièce contemporaine sur un poème de Louise Labé commandée pour l’occasion au compositeur Patrick Burgan… Cette diversité de répertoires vous est-elle chère ?
Joël Suhubiette : Elle m’est essentielle ! L’étude et la compréhension de chaque époque et de chaque style s’éclaire dès que l’on connait ce qui les a précédés. Chaque musique comme chaque art se nourrit des œuvres des maîtres précédents ou parfois s’en détourne volontairement. Ainsi par exemple, suivant la manière dont on les aborde les musiques de Monteverdi ou de Bach peuvent être regardées comme des « musiques anciennes » ou des « musiques modernes ». J’adore ce jeu-là ! Il détermine comment j’aborde les musiques. Être interprète n’est pas seulement admirer et s’extasier de la beauté d’une œuvre comme dans un musée, mais pouvoir se l’approprier, y plonger dedans, la vivre intensément. Souvent je me dis que les comédiens et les metteurs en scène ont eux aussi ce rapport aux œuvres de la littérature du passé. L’œuvre est regardée avec nos regards d’hommes et de femmes du XXIème siècle et c’est je crois ce que nous faisons avec les chanteurs tout au long des saisons.
« La descente d’Orphée aux Enfers » opéra de Marc-Antoine Charpentier
Création 2024 en partenariat avec Concerto Soave
- Le 18 octobre 2024 à 20h à la Maison de la Culture de Bourges
- Le 20 octobre 2024 à 15h au Grand Théâtre – Opéra de Tours dans le cadre du Festival Concerts d’automne – Réservations
L’Ensemble Jacques Moderne développe depuis plusieurs années différents projets de médiation culturelle. La transmission est-elle importante pour vous ?
Joël Suhubiette : Oui très important, elle permet au jeune public de découvrir les répertoires, elle permet de préparer le public de demain et d’étendre l’offre culturelle à toutes et tous. Cette année, pour la première fois, nous avons souhaité faire appel à Hervé Suhubiette, fin connaisseur de la voix et spécialiste du jeune public, afin de créer un spectacle pour et par le jeune public en collaboration avec quatre chanteurs professionnels de l’ensemble : « Qui a mis les pieds dans le plat ? » dont la restitution publique a eu lieu le 23 mai dernier au Conservatoire à Rayonnement Régional de de Tours.
« Qui a mis les pieds dans le plat ? », Création d’Hervé Subiette © bereflex
L’agenda des concerts de l’Ensemble Jacques Moderne
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