L’égalité sur ses trois pieds
Tribune Mai-Juin 2022
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Tribune par Anne Grumet, déléguée régionale de la FEVIS Auvergne-Rhône-Alpes
Le secteur musical dans l’ensemble de ses esthétiques est marqué comme l’ensemble du secteur culturel par de très grandes inégalités entre les femmes et les hommes. Ces inégalités sont systémiques et persistantes. Le constat est désormais admis et largement documenté depuis une quinzaine d’années.
L’un des apports importants de ces dernières années est introduit par le rapport sur la culture du Haut Conseil à l’Egalité (HCE). Pour la première fois en France, il propose la mise en place de l’égaconditionnalité.
De quoi s’agit-il ? Dans un secteur largement financé par l’Etat et les collectivités territoriales, l’égaconditionnalité consiste à faire de l’argent public un levier puissant pour l’égalité.
Comment ? En conditionnant les aides pérennes ou exceptionnelles – celles du plan de soutien par exemple – à des objectifs de progression F/H, dans un cadre conventionnel et pluriannuel pour ensuite évaluer les résultats et modifier – sous forme de bonus/malus – le montant des subventions. Ainsi, lorsque le Ministère de la Culture intègre cette proposition du HCE au sein de sa « feuille de route » annuelle, ce fut le signe d’un grand pas en avant. L’application au secteur du cinéma montre déjà le caractère vertueux de ce principe : deux femmes réalisatrices françaises ont obtenu en 2021 la plus haute récompense lors des deux grands festivals européens de cinéma : Berlin et Cannes.
Le secteur musical, via le Centre National de la Musique, applique désormais ce principe puisque les subventions sont conditionnées à un programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes.
Il faut s’en réjouir car il est urgent et impérieux de mettre un coup d’arrêt à ces violences tellement nombreuses et prégnantes. Mais voilà une approche bien incomplète ! Que sont devenus les deux autres piliers constitutifs de l’égalité : l’accès des femmes aux postes de direction, à la programmation, aux moyens de production, aux espaces de visibilité, aux réseaux ET la valorisation des artistes femmes dans l’histoire des arts (le Matrimoine) ?
L’application concomitante de ces trois piliers indissociables pour l’attribution des subventions serait une évolution structurelle d’envergure. Il faut le faire urgemment, tant le retard s’est accumulé. Elle permettrait au secteur musical de vivre de l’ensemble de ses talents, de ses ressources, de son histoire de façon moderne et exigeante. De quoi renforcer son développement et son attractivité.
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